skip to Main Content

Construire une solidarité nouvelle et un modèle social régénéré

La rentrée s’avance et certains veulent croire que les clameurs des stades auront fait oublier la crise sociale née de la loi El Khomri. On peut y croire ou faire semblant, mais le mal est fait et la blessure profonde. C’est peu dire en effet que, rarement dans notre pays, le calcul politique aura piétiné avec autant de rage le fragile équilibre social sur lequel est construite notre démocratie. Il nous faut désormais faire face à l’extraordinaire crise de confiance, née entre le pouvoir et les représentants des corps intermédiaires. Autrement désignés «partenaires sociaux», les organisations syndicales, devront reconsidérer leur place face à un pouvoir politique qui vient très concrètement de leur contester leur représentativité en matière de construction sociale.

Loi El Khomri et dialogue social

Ce n’est pas le moindre des paradoxes contenus dans la loi El Khomri, qui prétend sacraliser le régime majoritaire de validité des accords et qui s’est imposée contre la majorité des syndicats, contre la majorité des députés et contre la majorité de l’opinion. C’est bien la question du dialogue social qui est au cœur du sujet, autrement dit la question du rôle des acteurs sociaux et de la capacité qui leur est concédée à intervenir dans le champ économique du partage de la valeur ajoutée.

Car ce qui est à l’œuvre sous la trame de la loi «travail» n’est rien d’autre que l’expression du pouvoir règlementaire de la commission européenne, aux ordres et aux fins du pouvoir financier des grandes multinationales. Cette dernière «régulation» qui se met en place tend à contester aux organisations, qui en ont encore les moyens, le pouvoir de résister à ceux qui captent la quasi-totalité de la valeur ajoutée de l’économie mondiale, au profit de leurs seuls actionnaires.

Dévaluer la négociation de branche et son tissu conventionnel: voilà l’unique sujet social d’un pouvoir politique ayant renoncé à résister au développement sans limite du capitalisme financier. Car sur le terrain de l’interaction sociale, les décideurs politiques jouent des coudes et font de la surenchère. Envisager dans ce contexte l’avenir du modèle social est plus qu’un exercice vivifiant. C’est une question vitale pour penser une société, dans laquelle les acteurs de la construction sociale sont non seulement respectés mais aussi protégés contre les impératifs de la puissance financière. Il faut s’attacher à construire une solidarité nouvelle, en même temps qu’un modèle social régénéré. Il faut pour cela être fort, avoir les idées claires et ne plus s’abandonner au mantra de «la réalité du terrain», qui renvoie chacun à autant de conjectures aléatoires, impropres à sécuriser l’avenir de notre société.

François Hommeril, Président de la CFE-CGC
Back To Top